Les juges et la signature électronique ne font décidemment pas bon ménage

Date : Publié par

La Cour d'Appel de Versailles a rendu le 20 avril 2023 (RG n°22/04814) ne décision par laquelle elle reconnaît la validité de la signature électronique d'une convention de compte conclue entre la Caisse de Crédit Mutuel d'Erquy‑Pleneuf et un consommateur, mais sur la base d'une motivation totalement ahurissante.

La convention de compte présentait un solde débiteur de l'ordre de 10 000 € et c'est le consommateur qui avait interjeté appel, affirmant qu'il n'avait jamais signé cette convention et qu'il avait été victime d'une usurpation d'identité.

La banque produit au soutien de ses prétentions un fichier de preuve Docusign/protect&Sign, qui comprend les énonciations classiques de ce type de document et correspond manifestement à une signature avancée, dans le cadre de laquelle l'authentification du signataire repose sur une adresse mail et un numéro de téléphone transmis sur une base déclarative. 

La Cour, renversant la charge de la preuve, décide que c'était au consommateur de démontrer le manque de fiabilité du procédé alors que, s'agissant à l'évidence d'une signature non qualifiée (doc non présumée fiable), c'était au contraire à la banque de démontrer sa fiabilité... 

Voici une décision bien troublante, montrant une fois de plus le manque de maîtrise du sujet tant par des conseils non spécialisés que par des juges. Au‑delà de cette espèce, cela n'envoie pas un bon signal pour la façon dont les litiges à venir risques d'être appréhendés par les tribunaux.

À lire également

La signature scannée est une pratique douteuse

Date : Publié par
La Cour de Cassation a rendu le 13 mars 2024 (Chambre commerciale, 22-16.487) un arrêt très intéressant sur les limites du recours à la signature scannée pour attester de l'identité et du consentement de son auteur.

Signature électronique : et si on parlait du « lien » ?

Date : Publié par
En droit français, la définition de la signature électronique (Art. 1367 Al.2 Code civil) suppose un « lien » entre l’acte et la signature identifiant son auteur. Cette notion de lien se retrouve dans la définition de la signature avancée figurant au Règlement européen eIDAS (Art. 26) qui dispose que la signature avancée doit être « liée au signataire de manière univoque ». Mais la signification de ce lien n’est pas évidente. Nous pensons qu’il peut être compris selon trois approches : une approche conceptuelle qui projette sur la signature électronique une caractéristique de la signature manuscrite ; une approche technique le définissant via la technologie de la signature électronique ; et enfin une approche opportuniste liée au développement du certificat à la volée et de la notion de fichier de preuve, largement adoptée par les juges français.

Signature électronique : les juges se rebiffent

Date : Publié par
Sur la période de fin mars à mi-avril 2025, les Cours d’appel ont rendu une quinzaine de décisions sur la signature électronique. Près de la moitié d’entre elles refusent de reconnaître la signature du contrat par voie électronique, ce qui est un ratio exceptionnellement élevé par rapport à ce que l’on avait coutume de voir. Nous avons analysé ces décisions négatives.